La priorité en matière de logement est d’améliorer l’isolation du parc immobilier. Cependant, il apparaît que l’isolation seule ne suffira pas, notamment à cause de l’effet rebond : les améliorations de notre efficacité technique ont tendance à être absorbées par l’émergence de nouveaux usages. D’autres leviers doivent venir en complément.
Le levier d’action oublié : la taille des logements
L’administration fédérale a estimé que la moitié des réductions potentielles de gaz a effet de serre dans le logement se trouvait dans ces leviers de la sobriété : diminuer l’espace/la taille des logements ou régler la température. Le paysage résidentiel belge se distingue en effet par la grande taille de ses logements, comme le rappelle régulièrement Eurostat.
Nous ne souhaitons pas que les logements deviennent des « cages à poules » invivables et inconfortables mais plutôt optimiser les usages par rapport aux évolutions démographiques et à la contrainte climatique.
Ne plus empêcher la division
Aujourd’hui les freins à la division sont nombreux pour ceux qui veulent l’envisager : lourdeurs administratives pour changer la destination cadastrale de l’immeuble, contraintes urbanistiques intenables, interdiction d’ajouter des entrées indépendantes, volonté des communes de maintenir tels quels des quartiers dits « familiaux », entrepreneurs et architectes peu sensibilisés à cette option, etc.
Sortir du « Un seul logement pour la vie »
Nos besoins (de logement) évoluent avec notre vie : les besoins d’une famille ne sont pas ceux d’un jeune couple, ou de la famille recomposée. De même, beaucoup de personnes âgées sont aussi bloquée dans un logement trop grand (et trop cher).
Pourtant, les systèmes fiscaux et bancaires nous poussent à rester dans « notre » maison familiale toute notre vie, avec pour conséquence d’habiter dans des logements peu adaptés à la taille du ménage. Ajoutons qu’ils sont parfois mal situés par rapport aux lieux de travail après un changement professionnel.
S’il est légitime de vouloir soutenir l’épargne privée et l’accès à la propriété, cela doit se faire sans attacher les Belges à leur logement ad vitam aeternam. Il ne s’agit pas d’obliger qui que ce soit à déménager ! Mais simplement de ne plus l’en empêcher et de l’appuyer s’il le désire.
Le modèle « 4 façades » remis en question
On le voit dans le logement, en alliant efficacité et sobriété, on peut s’attaquer durablement à la fois à la crise environnementale et à la crise sociale. Cela passe par l’isolation qui est un des défis majeurs de notre temps. Mais nous devons aussi entreprendre un exercice collectif plus profond sur nos manières d’habiter. La « brique dans le ventre », le manque de mobilité résidentielle et le modèle de logement « 4 façades » habité par une famille doivent absolument être questionnés si nous voulons sérieusement diminuer nos trop grandes consommations énergétiques, que ce soit pour maîtriser nos factures de manière pérenne, pour le climat, l’Ukraine mais aussi pour faire du droit à se chauffer dignement un droit fondamental pour tous.
Arnaud Collignon,
chargé de mission chez Canopea (anc. Inter-Environnement Wallonie)